«La pensée pense ce qui la dépasse infiniment»




2010-12-18

sonhei com você.

J'ai rêvé de toi, sonhei com você, il m'apparaît tellement plus beau de rêver «avec» toi, en portugais. J'ai alors le sentiment que l'acte (ou le non-acte) de rêver est partagé, qu'il demeure un lien entre nos deux inconscients, que rêver avec toi implique réciprocité, échange, présence. «simultanéité dans le Temps». En français, «rêver de» présuppose déjà une distance, un éloignement entre la personne qui rêve et ce à quoi elle rêve, les éléments sont si détachés... alors qu'un rêve, de toi et de moi, un rêve est un retour à la fusion, perdue certes, mais rendue dans le rêve comme un espoir nouveau. Il me semble que rêver avec toi m'apparaît comme une possibilité réaffirmée dans l'univers. Un possible de notre impossibilité reconduit dans mon inconscient.

Tu es apparu. D'abord en retrait, un peu à l'écart. Et j'ai su que c'était toi. J'ai su que c'était toi et j'ai tremblé, j'ai senti mon corps frissonner à l'idée de ton nom. Tu étais là. À quelques pas de moi. J'ai d'abord détourné le regard. Tu es venu vers moi. Je t'ai regardé. C'était bien toi, mais tu ne te ressemblais pas tout à fait. Tu semblais vieilli, des mèches de cheveux blanches couvraient presque ton visage. Nos lèvres se sont touchées. À peine. Comme si tu ne pouvais franchir une certaine limite. On se touchait comme l'on touche une idée, c'est-à-dire qu'on manque à la saisir. Comme si tu n'étais là qu'à demi. Tu étais mince, si mince, ton corps me paraissait encore plus petit, frêle, sous les vêtements. Je ne me rappelle plus les vêtements. Tu avais ton bateau, là, accosté non loin. Ton bateau qui avait peut-être doublé, triplé, de volume, ton bateau qui me semblait presque un bateau de croisière. On me faisait remarquer que tu étais là depuis déjà un moment, ancré ici. Pourquoi ne t'avais-je pas vu auparavant? À cause de la voix, de cette autre voix, qui, toujours, est présente dans mes rêves. Ni la mienne. Ni la tienne. Une seconde voix d'homme. Qui régit, détourne mes pensées, mes images. Ton image. À-demi absente. Un toi vieillit. Et moi ? Je n'arrive pas à me voir. Ni à me rappeler la fin du rêve. Au réveil, j'ai constaté ton absence, toujours là. Et y ai senti une présence si forte, si pure, qu'elle triomphait de toute présence véritable.

Le lendemain, j'ai trouvé ce poème, sur un mur,
dans le centre-ville.

Tu l'as écrit pour moi, peut-être.

La texture des lettres comme le grain de ta peau.