«La pensée pense ce qui la dépasse infiniment»




2010-06-27

Ter um destino e não caber no berço onde o corpo nasceu, e transpor as fronteiras uma a uma e morrer sem nenhuma.

- Miguel Torga -

2010-06-15

rien.

Rien n'a changé, en fait tout est trop pareil, trop blanc, trop bruyant, trop superficiel, trop amer. Le monde, si grand, redevient petit au fur et à mesure que le piège m'enserre et me sature de faux-semblants. Impression de déjà-vu. Et cette pierre qui se replace si facilement au creux de mon ventre. Je croyais l'avoir laissée derrière moi cette pierre trop lourde et trop grise, je croyais l'avoir jetée à la mer. J'ai encore ce poids terrible qui me tire vers le sol, j'ai encore cette angoisse comme moteur face à un monde cruel. Je voudrais parfois hurler, jeter mon pain sec contre le mur, leur faire ma plus belle révérence, et partir.
Partir.

Retour forcé de l'automate. Je deviens soudainement double, je me toise moi-même du regard, de l'autre côté du comptoir, je me regarde attentivement, et je ne me reconnais plus. Je ne comprends pas ce que je fais là, toujours derrière ce même comptoir. Mon «moi» se divise radicalement et je n'arrive plus à en rallier les deux parties, une des deux devra mourir. Et j'ai bien l'intention que ce soit ce «moi» derrière le comptoir qui cède.
Comme il se doit.

Rien n'a changé. Moi j'ai changé. En fait, plutôt qu'une troisième jambe, c'est un chapeau qui a poussé, un petit chapeau rouge et luisant qui me fait comme un charme: appelons-le l'égo, même si ce terme a été maintes fois critiqué par notre société moderne et fatiguée qui prône la perte de l'égo pour l'atteinte de la paix et de la sérénité. Être humble, bien-sûr, mais ne faut-il pas aussi pousser l'esprit à se dépasser, à voir au-delà du possible, à rêver? Ne faut-il pas - outre lâcher prise bien-sûr- persévérer quand c'est difficile, quand un monstre nous gruge les entrailles, ne nous devons-nous pas d'aller au fond des choses, de vivre intensément, dramatiquement? Ce haut de forme rouge (oui c'est plutôt un haut de forme) me redonne fière allure, me permet de conserver ma vision. J'ai eu une vision. J'ai assemblé des visages, des paroles, des expressions, des histoires, qui m'inspirent, m'ouvrent la voie, me montrent que l'univers des possibles est infini.

Avoir une vie différente. Extraordinaire. Hors de tout, hors d'ici, hors du temps, hors de moi, hors des frontières, et surtout hors de cette fille aigrie derrière le comptoir.

Rien n'a changé. Je suis toujours ce que tes yeux m'ont renvoyé. Je suis cette beauté, cette force; et aussi cette tristesse, cette vulnérabilité, que ton regard caressant ma peau m'a reflétées. Je suis ces morceaux épars et brisés qui me composent, de manière chaotique; je suis la mer, déchaînée et dangereuse, je suis aussi l'écume, aussitôt effacée par le passage de mes vagues.

Alors que tout nous dicte la vie sédentaire, la sécurité, le fond de pension, la stabilité; je veux l'aventure, le désordre, la mouvance, le danger. Je veux, d'échec en échec, me diriger vers ma propre victoire.

Ma passion sera mon chemin; la douleur, mon salut.

Uma dor alegre.

2010-06-07

realidade.

Me voilà rentrée en terre promise, mais il me semble que cette terre est bien poussiéreuse et terne avec ses pavés de béton et ses bruits assourdissants.

Ma douce mer me manque déjà terriblement avec ses étendues infinies de bleu et ses vagues houleuses et paisibles. La mer, unique porte d'entrée vers l'abyssal, lieu de tous les possibles. L'impossibilité inachevée. A loucura inalcancavel.

Si seulement ma réalité pouvait se fondre dans ce moment trop court contenu entre mon ciel et tes draps, entre ton corps et ma peau, entre mon désir et ta jouissance.

Si seulement ma réalité pouvait naviguer et se moquer des tempêtes, se moquer des cris stridents sur la berge, se moquer de ceux qui restent derrière, se moquer de moi.
Et j'échouerai dans un grand rire tonitruant.

Mais ma réalité fuit, continuellement, vers l'extérieur, comme une vieille bande de cinéma qui déraille et qui ne cesse de se dérouler, sans qu'on ne puisse l'arrêter, en accéléré sur fond musical de piano, jusqu'à l'épuisement, jusqu'à la consumation complète de la bande.

Si seulement ma réalité pouvait avoir le goût qu'ont tes lèvres, pouvait sentir cette odeur légèrement salée qu'a ta peau, pouvait être l' ivresse ressentie au contact de tes cheveux dans mon cou, pouvait se composer de cette lueur du petit matin dans tes yeux.

Si seulement ma bande pouvait tourner un peu dans le sens contraire, ou alors débloquer dans une autre dimension, je ferais de la mer mon plateau de tournage, et je ferais de nous deux des étoiles sur fond de ciel noir.

Ma réalité, un rêve.

En suspens.